mardi 14 avril 2009

Ecole Diamalaye

 

École primaire Diamalaye, Yoff, Sénégal. Mon groupe de gestion de projet a pris un rendez-vous avec la directrice pour ce matin. Sénégalaisement, cela veut dire que nous venons presque à l'heure, il ne faut pas exagérer non plus, pour attendre toute la matinée.

Assis à l'ombre je contemple la cour de récréation qui s'anime, un grand terrain de sable piqueté de quelques arbres. Tout autour, se trouvent les salles de classe. Le nom du professeur est inscrit à l'entrée sur un tableau noir desséché. Deux classes préparatoires. Deux classes de CE1. Deux classes de CE2. Deux classes de CM1. Deux classes de CM2. Le calcul est vite fait. Le compte est bon, c'est un déferlement d'enfants qui ne tarde pas à s'imposer face à la quiétude de l'endroit.

On dit que les classes françaises sont surchargées, qu'elles ne permettent pas un apprentissage idéal. Que dire alors des classes africaines ? Avec soixante élèves par cours, ce sont les professeurs qui sont dépassés. Des enfants plein les bras et des hurlements plein les oreilles, ils sont parés, fin prêt à partir en guerre après chaque tartine du matin. Sénégalaisement, les enfants n'arrivent pas non plus à l'heure, sortent de la salle, s'agitent dans tous les sens et crient en permanence pour se faire entendre de leur instituteur. Beaucoup plus que je ne saurais jamais endurer dans ma carrière d'enseignant.

Dans la cour de récréation, les jeux sont partout les mêmes, en revanche. La mondialisation ne pourra rien y faire, un ballon et quelques billes ou cailloux seront toujours légion aux quatre coins du globe, le combat est perdu d'avance. Et encore des cris, des rires et des pleurs qui vous renvoient dans votre enfance, des souvenirs plein la tête.

Tous en uniforme, les enfants ne sont qu'à peine surpris de me trouver là, au milieu d'eux. C'est plutôt la présence de mes étudiants qui les intrigue. Que font donc là ces grands enfants ? Sont-il des anciens de l'école ? Oui, dans le cas de Marème qui nous a obtenu le rendez-vous pour nous et qui deviendra porte-parole du groupe par la force des choses.


Après quelques temps, la directrice revient enfin dans son école. C'est une ancienne institutrice également, comme bien souvent. Du type de femme assez réservée mais qui en impose, elle nous accueille poliment dans son bureau. Sans fioritures.

Les présentations effectuées, je lui explique rapidement qui nous sommes, le rôle de l'association et l'intérêt de ce cours de gestion de projets pour nos étudiants. Bien vite, je m'éclipse derrières ces derniers pour les laisser exposer notre concept. Ils s'en sortent plutôt bien, d'autant que la directrice n'est pas difficile à convaincre. « Tous les projets qui servent l'éducation sont bons à prendre » me dira-t-elle à la fin de notre entretien.

Concrètement, nous envisageons de venir faire deux matinées de sensibilisation à l'importance de l'école, et surtout de la lecture, dans les classes de CM1 et CM2, durant la dernière semaine de mai. Au Sénégal, beaucoup d'enfants quittent l'école à ce moment charnière de la scolarité, juste avant l'entrée au collège. C'est la raison pour laquelle nous nous sommes appuyés sur une cible fragile mais attentive. Les plus jeunes seraient hermétiques à notre discours. Pour les plus grands, il seraient déjà trop tard. Au-delà de l'aspect sensibilisation qui prendra la forme de discours et de petits sketchs sur le thème de l'école, nous organiserons des tournois du type « génie en herbe ». Ce sont des concours de connaissance qui sont organisés ici assez fréquemment, même s'ils sont en principe réservés aux meilleurs éléments de chaque école. Pour nous, pas question de laisser les instituteurs sélectionner ceux qui auront le droit de participer à notre concours. Tout le monde sera de la partie. De même, tous les élèves seront récompensés de leur participation et recevront au moins une fourniture scolaire. Les meilleurs, quant à eux, recevront des livres ou des sac-à-dos. La prime à l'excellence allant de paire avec notre message « je veux aller et réussir à l'école ».

Le projet est rapidement présenté. La directrice n'a que peu de questions, ce qui déroute un peu mes étudiants qui s'attendaient à discuter davantage pour la convaincre. Ce ne sera pas la peine. Elle est favorable au projet et nous donne automatiquement sont accord pour organiser nos deux matinées. Elle réunira prochainement sont équipe pédagogique pour convenir des dates avec les professeurs.

Organiser un projet, peu importe son ampleur, ne nécessite souvent que de la bonne volonté et le souffle de chance suffisant pour tomber sur des personnes ouvertes d'esprit prêtes à laisser leur chance à des jeunes débordant d'idées. Une simple visite nous aura suffit pour obtenir ce que nous voulions : une école, les moyens matériels, le temps nécessaire et un sourire. Quoi de plus facile ?

Satisfait, si ce n'est fier, de mes étudiants, je quitte l'école Diamalaye avec un sentiment de devoir accompli. La première étape est passée. Il ne reste plus qu'à trouver le financement. À nous de rencontrer les partenaires et sponsors idéals pour mener à bien notre projet. Je laisse alors les cris des enfants, leurs rires et leurs pleurs derrière moi. Je laisse la cour de récréation, à présent vide, dans mon dos. Je me dis une dernière fois que l'éducation est vraiment la clé de tout, que tout passe définitivement par elle.

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